Sortir pour aller à la rencontre

Les arts de la rue tels qu’on les connait aujourd’hui sont le fruit d’une dynamique initiée à la fin des années 1970, par des artistes attirés par le dehors. Alors que le chemin de l’institutionnalisation a été, au cours des décennies précédentes, de créer les lieux pour la culture, ces cognes-trottoirs ont voulu s’échapper et retrouver le ciel pour seule voûte à même de couvrir leurs œuvres.

Sortir, en premier lieu, est une démarche de mise en partage : il s’agit d’aller chercher d’autres publics, moins habitués au confort des lieux dédiés à l’acte artistique. Mais c’est aussi une volonté de sortir du cadre préétabli, et ainsi de faire tomber les barrières mentales qui grandissent entre ce qui serait culture, et ce qui ne le serait pas : la quête de l’espace public est celle de retrouver le commun, et de remettre l’acte artistique au cœur de la société.

La Classe Dehors relève alors de la même intuition : l’enseignement doit-il se cantonner aux lieux dédiés à cette pratique ? Est-ce qu’en l’enfermant ainsi entre les murs protecteurs de l’école, on ne réduit pas la potentialité de la classe ?

Poser la question, c’est déjà y répondre. Les écoles comme les théâtres gardent leur nécessité et leur légitimité, mais il faut savoir en sortir pour se confronter au monde, pour aller à la rencontre du vivant, humains et non humains, pour se frotter aux dynamiques, aux flux, aux souffles qui animent les villes et les campagnes. Sortir pour inclure, aller à la rencontre, laisser advenir l’inconnu et l’imprévu. Que ce soient des performances ou des protocoles d’enseignement, les laisser se faire bousculer par la réalité. Les penser souples, furtifs, capables d’absorber cette part d’aléatoire que l’on rencontrera probablement au dehors, et en sortir plus grand, plus beau, plus complexe … et plus riche du chemin parcouru ensemble au-dehors.

Par Alexis Nys – Directeur de Lieux Publics, centre national des arts de la rue et de l’espace public & pôle européen de création